D’hier à aujourd’hui, la botanique dans les ouvrages jeunesse

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Article rédigé par AGNES BENETEAU
Bibliothécaire jeunesse médiathèque jeunesse « Pourquoi pas ? », Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse

La médiathèque jeunesse du Muséum de Toulouse conserve une collection méconnue d’ouvrages de vulgarisation scientifique: le fonds patrimonial jeunesse. Son étude permet de retracer l’évolution de la transmission des connaissances auprès des jeunes lecteurs depuis le début du XXème siècle. Dans cet article, en prenant l’exemple de la botanique, nous vous proposons de découvrir les manières dont les plantes, leur détermination et leur connaissance ont été abordées au fil du siècle, et à travers elles la sensibilisation des enfants à ce patrimoine naturel.

Le fonds patrimonial jeunesse se caractérise par le reflet « pédagogique » d’époques plus ou moins lointaines, chaque ouvrage étant remarquable quant à sa date de parution, sa maison d’édition, son illustration, ses propos, son esthétique,…

Issu d’opérations de désherbage des collections du service, de dons ou d’achats, il s’enrichit peu à peu et compte à ce jour 273 titres, dont près de 20 % en botanique.

Ces ouvrages de botanique se répartissent, schématiquement, en quatre grandes périodes :

  • le livre accompagne l’enfant-élève sur le terrain , loupe à la main, avec les classes promenades où l’apprentissage est suscité par l’observation directe du milieu local, par tâtonnement expérimental quant à la détermination botanique à l’aide de petites flores et par des travaux pratiques en classe (constitution d’herbiers ou de petites collections raisonnées) : ce sont les années 1920-30, avec les précurseurs de l’Éducation nouvelle (pédagogie Freinet) et les revues documentaires « Bibliothèques de travail » (BT) ainsi que les « Bibliothèques de travail junior » (Btj), écrites par des classes sous forme de reportages à destination des enfants. A noter que cette dernière est toujours éditée.

Autre grand nom de la littérature jeunesse à vocation pédagogique incitant les enfants à observer à l’extérieur animaux et plantes, les albums du Père Castor (depuis 1930 jusqu’à nos jours et entrés au Patrimoine Mondial de l’UNESCO en 2018). Par le biais d’une petite histoire enrichie d’encarts documentaires, ils informent les jeunes lecteurs sur leur environnement proche. D’autres maisons d’éditions se réfèrent à ce modèle comme « Les albums coccinelle » chez Nathan.


La petite abeille découvre les fleurs / texte et images de Romain Simon. – [Paris] : F. Nathan, 1972. – 1 vol. (Non paginé [20] p.) : ill. coul. ; couv. ill en coul. ; 22 x 19 cm. – (Un Album coccinelle).
Magasin Conservation Partagée Jeunesse du Muséum de Toulouse, Cote CPJ C 77.

Crédit Lisa Cocrelle, Muséum de Toulouse
  • le livre est une référence, un appui pour les leçons de choses en classe. Le matériau d’observation est fourni par l’enseignant à l’élève (pomme coupée en deux, marron et sa bogue,…), celui-ci devant illustrer son cahier par du dessin d’observation ou par des vignettes à découper : nous sommes dans les années 1960-70.

Ces « devoirs d’élèves » sont à rapprocher des planches de la maison Deyrolles, accrochées aux murs de la classe et qui sont de véritables supports pédagogiques : représentations éclatées de fleurs et de fruits, germination, pollinisation, silhouettes d’arbres ou de feuilles …C’est aussi l’époque où l’illustration fait la part belle à la photographie en noir et blanc .


Elle pousse ma jacinthe / Anne-Marie Pajot ; photographies de Antoinette Barrère. – Paris : Hatier, 1965. – 1 vol. (16 p.) : ill. ; 23 cm. – (Ami-amis. Images de la Nature).
Magasin Patrimoine Jeunesse du Muséun de Toulouse, Cote J C 13.
Crédit Lisa Cocrelle, Muséum de Toulouse
  • le livre informe, théorise.Avec l’émergence de l’écologie, la botanique est abordée sous l’angle du particulier au général, de la plante à son écosystème. Ce sont les premières évocations de la notion de « milieu », du concept de « Nature » où l’attention de l’enfant est dirigée sur la relation existant entre le végétal et son environnement (interactions entre flore et faune). Cela correspond aux années 1970-80 et plusieurs éditeurs suivent le mouvement des années post 68 (Gamma, Usborne, Chat Perché, Dupuis, L’École des Loisirs). Tous auront à cœur de proposer aux botanistes en herbe des activités d’extérieur et d’intérieur.

Comment vit un arbre / [texte et ill. de M. Gomboli] ; [adapt. de Didier Sénécal]. – Paris : Nathan, cop. 1988. – 1 vol. (15 p.) : ill. en coul. ; 28 cm. – ISBN 2-09-271622-0.
Magasin Conservation Partagée Jeunesse du Muséum de Toulouse, Cote CPJ B 178.
Crédit Lisa Cocrelle, Muséum de Toulouse

A noter un changement dans l’appréhension des plantes : en 1976, les éditions Gamma publient « Graines et mauvaises herbes ». Près de 20 ans plus tard (1994) le terme sera remis en cause, et l’École des Loisirs édite « Les bonnes mauvaises herbes » dans la collection « Archimède » ; nous sommes passés à une autre vision de la Nature.

  • le livre « invite » l’enfant à retourner dans la nature: effet de mode où l’édition surferait sur la vague « verte » ou bien prise de conscience réelle face aux enjeux de la biodiversité ? (années 1980 à nos jours). L’observation sur le terrain est proposée cette fois en famille, avec un partage intergénérationnel, tout en dispensant une information scientifique vulgarisée de très bon niveau. Le livre devient un outil complet permettant d’aborder la botanique à tous les âges, sans dissocier la plante de son milieu. L’illustration y joue un rôle majeur en redevenant naturaliste. Les activités proposées ne sont plus de réaliser un herbier de plantes sauvages, avec le risque de dégrader le milieu où elles croissent, mais la photographie ou le dessin d’observation in situ. Un peu comme un retour aux précurseurs des années 1920…

Aujourd’hui, plusieurs maisons d’édition assurent une continuité sans faille dans le domaine de la sensibilisation à la botanique pour les jeunes lecteurs. Le livre propose également d’autres modes de découverte de la botanique, par le toucher, grâce à des ouvrages tact-illustrés à destination d’enfants déficients visuels.

Bibliographie sélective des ouvrages concernés, classés par ordre chronologique

Photo : La médiathèque jeunesse Pourquoi pas ? au Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse.


Image d’en tête : Credit Freepik